Qu’est-ce que le stress ?

Même si d’autres chercheurs s’étaient déjà penchés sur le sujet de la physiologie du « stress » et des effets des émotions en notre corps (Claude Bernard fin XIXe, médecin et physiologiste français ; Sir William Osler début XXe, cardiologue canadien, Walter Cannon 1928 ; physiologiste américain met en évidence la Sympathine que nous appelons maintenant Noradrénaline), c’est Hans Selye en 1936 (Médecin Canadien, surnommé le Einstein de la médecine) qui mit en lumière et nomma « stress » ce qu’il identifia comme une réponse non spécifique du corps à toute demande.

Le stress est une réponse physiologique et psychologique aux stimuli (agressions, événements, sollicitations…) nécessitant une adaptation pour maintenir un état d’équilibre interne (physiologique et psychologique) et rester en vie.

Le mécanisme déclenché par le stress et sa mise en valeur par H. Selye (1956) sera appelé : le syndrome général d’adaptation (SGA). Ce syndrome est la réaction du système endocrinien sous la forme d’une sécrétion d’adrénaline, de noradrénaline et de cortisol que l’on appelle hormones du stress.

H. Selye en distinguera 3 phases :

La « phase d’alarme » 

C’est le moment d’identification du danger et de préparation à la réaction physique et psychologique. Le corps réagit, le système endocrinien sécrète les hormones de stress pour déclencher une réponse qui a pour but de mobiliser l’énergie nécessaire pour faire face.

Pour comprendre qu’en chacun de nous le stress est un phénomène nécessaire pour réagir, s’adapter, combattre ou fuir, il suffit de remonter dans le temps : à l’ère préhistorique. Les 2 adaptations indispensables à notre survie étaient l’attaque (pour se nourrir) et la fuite (pour éviter un danger). Pour survivre, nos ancêtres devaient maintenir leur niveau de vigilance face à un milieu de vie dangereux et le stress leur permettait de réagir au bon moment : il s’agit du « bon » stress.

La « phase de résistance » 

L’adaptation physiologique a eu lieu, le taux d’hormones redescend, mais les réserves d’énergie adaptative utilisées lors de la phase d’alarme sont réduites.

Il est alors nécessaire de recharger cette énergie afin d’avoir la capacité de faire face à une nouvelle situation « stressante ». Dans le cas d’un environnement nous exposant à de nombreuses sources de « stresseurs », avec peu de solutions pour s’en extraire, souvent soumis à la pression de la vie active, il est important de prendre conscience que notre organisme ne peut résister à long terme et il y a de nombreux moyens de prévenir l’escalade vers un état plus critique (faire une pause, de la méditation, planifier des loisirs, sortir, lever le nez…). Nous ne sommes pas égaux face au stress, mais il ne faut pas en négliger l’impact. 

La « phase d’épuisement »

Le stress perdure et se maintient dans le temps par la multiplication des « stresseurs ». Les ressources énergétiques nécessaires à l’adaptation sont épuisées. Le niveau de stress ne peut plus redescendre, mais il peut encore augmenter : c’est la surcharge.

Cette phase est dangereuse pour la santé. Des symptômes physiques et psychiques tels que l’anxiété, la perte de sommeil, l’angoisse, la dépression peuvent apparaitre. Il est alors primordial d’identifier cet état et de répondre individuellement aux besoins qui permettent de « désamorcer » cette pression : identification des sources de stress, introspection, thérapie et, au-delà, diagnostic médical si nécessaire. Les ressources sont aussi variées qu’il y a d’individus. Il est donc, à ce stade, primordial de bien en percevoir les symptômes, d’identifier le degré de stress que ressent la personne et ce qui se cache derrière cet état.

Le stress n’est pas une maladie, mais il peut être considéré comme un facteur favorisant de certaines maladies psychiques et physiques d’origines multiples.

En soi, la production des hormones du stress et la réaction qu’elles génèrent ne sont pas problématiques dès lors que nous retrouvons notre calme et que les hormones retrouvent leur niveau initial.

Le lien entre le stress et la maladie survient lorsque l’organisme n’est plus en capacité de faire face (phase d’épuisement, surcharge). Soumis à de trop fortes pressions, il ne peut plus mettre en place les procédures d’adaptation (SGA) : c’est à ce moment-là que l’on peut voir apparaitre la maladie.

Le stress modéré

Il fait partie de notre vie quotidienne : rentrée scolaire, passage d’un examen, entretien d’embauche, un imprévu, un retard pour prendre un avion, un premier rendez-vous amoureux, le mariage… toutes ces situations ont vocation à être brèves et le niveau de stress qu’elles provoquent ne dure pas, même si les réactions sont aussi variées que nous sommes différents les uns des autres.

Le stress chronique

Il persiste et revient de manière répétée même à distance du « stresseur ». Dans cette situation, l’organisme ne peut plus retrouver son état d’équilibre et de nombreuses pathologies peuvent alors apparaitre si cet état persiste. Soumise à une trop forte pression et à sa constance, une personne pourra développer différents symptômes psychologiques, émotionnels et comportementaux :

des troubles cognitifs mineurs : perte de mémoire, difficultés de concentration et d’attention (difficulté à trouver un mot, oublie de l’endroit où elle a posé un objet, acuité moins performante dans la suite des idées),

des troubles anxieux : crise d’angoisse, hyper-vigilance, troubles phobiques, troubles obsessionnels compulsifs (TOC),

de l’émotivité et une irritabilité inhabituelles ou disproportionnées au regard de l’évènement : colère, tristesse, rancœur, crise de larmes, sensation de mal être, excitation…

des troubles dépressifs : perte d’estime de soi, perte d’intérêt pour l’environnement, tendance au repli sur soi,

des troubles de l’appétit : boulimie, anorexie, habitudes nutritionnelles anormales,

Les découvertes de Selye ont permis à ses successeurs, endocrinologues et neuro-scientifiques, d’étudier la production d’hormones et leurs actions sur le système nerveux périphérique. Pourtant, ils ne prirent pas tout de suite conscience de leur influence sur le cerveau. Ce n’est qu’en 1968 que Bruce Mc Ewen (biochimiste et neuroscientifique américain) mit en évidence les récepteurs cérébraux du cortisol, l’hormone du stress chez l’homme. Les études sur les effets du stress prirent un nouveau virage lorsque Mc Ewen rapporta que la région du cerveau présentant la plus forte densité de récepteurs était l’hippocampe, une structure significativement impliquée dans l’apprentissage, la mémoire et la régulation des émotions. Ceci permit d’entrevoir les effets du stress et du stress chronique sur le psychisme.

Le stress, tout le monde le vit mais pas toujours de la même manière !

Les agents stressants déclencheurs du « syndrome général d’adaptation » seront appelés « stresseurs » et l’on en distingue deux catégories :

Le stresseur absolu est factuel, objectif et universel : guerre, tremblement de terre, tsunami, accident d’avion, de voiture, attentat, maladie, agression physique… Le stress absolu est primordial à notre survie, il permet de fuir, d’attaquer, de nous protéger du danger.

Le stresseur relatif : comme son nom l’indique, il est relatif et nécessite une interprétation (consciente ou inconsciente) de la part de celui qui le vit. La réponse biologique au stress dépend de l’importance que l’individu lui porte, de son histoire, de son entourage, de son environnement.

Ces agents stressants, qu’ils soient absolus ou relatifs peuvent nous toucher physiquement et psychologiquement. Les chercheurs ont ajouté 2 nouvelles distinctions de stresseurs :

• Le stresseur physique opère une tension ou une contrainte sur notre corps (ex. : des coups, des blessures, des températures très froides ou très chaudes, des maladies, une opération chirurgicale…).

• Le stresseur psychologique peut quant à lui générer un état de stress suite à un événement tel que la perte d’un proche ou un divorce mais il peut également résulter de pressions plus constantes vécues au quotidien : bruit, surcharge de travail, perte d’emploi, conflits, événements familiaux, exigence personnelle, médias d’information et sociaux, sensation de course contre la montre…

Dans les années 1960-1970, des travaux dépassant le modèle de Selye, ont commencé à mettre en évidence l’importance des perceptions, autrement dit des processus cognitifs, dans la survenue de l’état de stress.

Le stress, face à une réalité objective ou subjective :

Suite à une étude en 1984, Lazarus et Folkman ont proposé un nouveau modèle d’analyse : le stress dépendrait de l’état cognitif évaluant chaque situation et de sa capacité d’adaptation. Ce modèle aborde l’intensité du stress comme le produit entre la réalité objective et la perception qu’en a l’individu.

Face à une situation stressante, nous procédons immédiatement à son évaluation, de façon subjective. Cette évaluation est un processus mental pour lequel nous allons mesurer deux éléments : la menace que peut contenir la situation et les ressources que nous avons pour y faire face.

«Le stress est une relation entre la personne et son environnement, qui est évaluée par la personne comme tarissant ou dépassant ses ressources et menaçant son bien-être ».
Lazarus et Folkman « Stress, Appraisal and coping » 1984

Lazarus et Folkman décrivent ce processus cognitif et postulent que ce ne sont pas les événements eux-mêmes qui déterminent l’apparition d’un état de stress (avec ses conséquences négatives sur la santé physique et mentale des individus) mais les perceptions et le vécu de ces événements. Une même situation provoquera une importante réaction de stress chez un individu et de l’indifférence chez un autre. Et une même personne réagira différemment à la même situation, à différents moments de sa vie, selon les circonstances qu’elle rencontre, son vécu, sa personnalité, sa construction psychique. On constate donc que les mécanismes physiologiques mis en jeu ne suffisent pas à expliquer les nombreuses réactions d’un individu face au stress.

La perception du stress vu sous un angle psychologique permet de mieux comprendre pourquoi, face à des agents stresseurs, nos réactions sont si différentes les unes des autres : une multitude de facteurs personnels jouent un rôle central dans la réaction au stress dès lors qu’il n’est pas de l’ordre de la survie.

« Mais pourquoi stressons-nous pour des choses qui ne sont pas nécessaires à notre survie ? La réponse est simple, parce que notre cerveau ne sait pas que nous sommes au 21e siècle » Sonia Lupien – Par Amour du stress

Le stress est un sujet mondial, l’OMS met en garde sur les effets du stress et le Bureau international du travail considère que « le stress est devenu l’un des plus graves problèmes de notre temps, non seulement pour les individus dont il met en péril la santé physique et mentale, mais aussi pour les entreprises et les gouvernements ».

COVID-19 : L’actuelle pandémie du coronavirus constitue une réalité particulière et inhabituelle depuis maintenant 1 an. Il semble que le stress chronique gagne de plus en plus de personnes. Les témoignages au quotidien montrent cette évolution de l’état psychologique de chacun. De plus en plus de gens se plaignent de fatigue, insomnie, démotivation, angoisse, isolement, irritabilité, perte de mémoire, augmentation de la consommation de tabac ou de boissons alcoolisées… L’OMS elle-même, publie des circulaires pour mettre en garde les Etats et leur faire prendre conscience de l’impact psychologique sur les populations. La suite de la pandémie de COVID 19 sera-t-elle une « pandémie de stress » ?